Tensions Chine-États-Unis : guerre commerciale, terres rares et réindustrialisation Une émission de BFM qui s’interroge sur la planification et le libéralisme !

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Incroyable comme le monde est déjà transformé, à tel point que des experts économistes libéraux en viennent à dire clairement que le libéralisme est en échec face à la planification chinoise, et que l’intervention de l’état est favorable à l’innovation... Dans une émission « business » pour des auditeurs habitués au discours patronal, l’animateur commençant par ces mots « ça secoue, ça secoue très fort »... Un des intervenants s’intéresse au prochain comité central du parti communiste chinois...

La conclusion est incroyable, et je la dédis à Danielle Bleitrach. C’est un économiste libéral qui s’interroge sur « Le modèle chinois pour la France »... Il est vraiment temps que le PCF s’éveille à la Chine ! Quand le patronat Français s’intéressa aux débats internes du PCF, on sera en bonne voie...

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Emission du 13 octobre « Investir » de BFM Business
 Animateur : Antoine Harry Gaudry
 Experts invités :** Philippe Mutrici, Hervé Gouletequer, Léonidas ?, Céline ?

Introduction : Un contexte international tendu

Antoine Harry Gaudry :
Et ailleurs dans le monde, ça secoue, ça secoue très fort, notamment entre la Chine et les États-Unis. Donald Trump a annoncé vendredi potentiellement 100 % de tarifs douaniers supplémentaires sur les importations chinoises. Pourquoi ? Parce que [Shi Jinping] vient de lui rappeler qu’il était le maître des terres rares, le maître du monde. Et finalement, est-ce qu’on n’est pas plus puissant en détenant les terres rares qu’en imposant des droits de douane ?

Philippe Mutrici, les quelques chiffres qui sont connus : la part d’emprise de la Chine sur le raffinage des terres rares – pas l’extraction, mais le raffinage – faut rappeler que les terres rares ne sont pas rares, finalement, on en a un peu partout. Le raffinage, c’est autre chose.

1. La domination chinoise sur les terres rares : un avantage stratégique

Philippe Mutrici :
Le raffinage c’est c’est compliqué, c’est surtout très polluant et puis ça prend beaucoup de place et cetera. Enfin
bon bref, les Chinois se sont positionnés dessus, ce qui est d’ailleurs très émile de leur part. Ils commencent à essayer d’en retirer les bénéfices. C’est entre 60 et 95 % selon les matériaux. Alors, est-ce que si je dirais c’est grave dans l’absolu, c’est grave à court terme ? C’est pas un retard qui n’est pas rattrapable, mais c’est pas rattrapable dans les 5 ans.

On peut rattraper, on peut se décider tous, tous les pays qui aujourd’hui ne raffinent pas se mettent au raffinage. Il faut des gros investissements dans une période budgétaire compliquée, sachant qu’on doit investir pour la décarbonation, qu’on doit investir pour l’IA, qu’on doit investir ceci, cela. C’est sûr que dans cette répartition du monde idéal qui était la répartition de la mondialisation en fait hein, à partir du moment la mondialisation n’est plus acceptée aujourd’hui telle qu’elle était. tout ce qui était idéal où chacun se partage les fonctions, ça fonctionne plus. C’est un avantage provisoire mais c’est un avantage à double tétendre. Je dirais que euh faut pas oublier que la Chine elle a un autre enfin elle a un problème, elle a un avantage mais elle a un problème, c’est qu’elle est en surproduction massive complètement.

Et donc engager, enfin remettre une pièce dans la machine dans la guerre commerciale infé dans l’intérêt de la Chine. Donc est-ce qu’on assiste pas simplement à une petite remontée de pression des deux côtés comme on avait eu au début de l’année pour essayer d’obtenir le meilleur accord possible ? Je souhaite que ça ne soit que cela. En tout cas, dans la durée, la Chine n’a pas intérêt à se couper de s déboucher en Occident, sinon son économie ne pourra plus vendre ce qu’elle produit.

2. Bras de fer économique : qui cédera en premier ?

Antoine Harry Gaudry :

Est-ce que Trump peut rétropédaler ? Je rappelle que 1er novembre, on passe à 130 % de droits de douane sur
les produits chinois.

Hervé Gouletequer :

Non, mais si ça fait mal aux États-Unis et la façon dont on mesurera si ça fait mal aux États-Unis, c’est l’évolution des indices boursiers. Si ça fait mal aux États-Unis, le rétropédalage de Donald Trump est assuré.

En fait, dans cette histoire, chacun joue le coup d’après parce que jusqu’à maintenant justement ça n’a pas fait mal. En fait, quand on voit l’économie américaine premier semestre, pas terrible mais finalement ils ont évité le pire. Le 3è trimestre pourrait être meilleur qu’attendu. Donc ils se disent finalement on est assez habile, on y
arrive. Et les Chinois se disent exactement la même chose. On a eu ce matin les chiffres d’exportation de septembre, commerce extérieur dont exportation de septembre de la Chine. Ils sont très bons. Certes, les États-Unis ne sont plus un marché ou un marché qui se réduit mais ailleurs dans le monde ça va drôlement bien. Donc
en fait dans ce bras de fer et bien chacun se dit qu’il est possible d’aller un peu plus loin. Alors après celui qui va lâcher le premier risque d’être pris pour le perdant.

Et en la matière les États-Unis qui sont quand même plus une économie de marché que la Chine par l’intermédiation des bourses et bien est capable de lâcher prise plutôt parce que la sensibilité au mal va venir plus vite. La Chine pays très centralisé, très contrôlé. Il y aura des erreurs, hein, Philippe en rappelait. Mais mais en fait ça va prendre plus de temps.

La toile de fond, c’est que la Chine monte en puissance. Les États-Unis ne veulent pas que sa situation première hégémonique peut-être soit remise en cause. Et les Chinois se disent « On a les moyens de le faire. » Et là, il y a un petit jeu euh qui n’est pas sain du tout, mais comme on est dans un monde qui devient moins ouvert et bien ce petit jeu, il paraît acceptable au moins par les uns et par les autres.

3. Interdépendances et risques de rupture

Antoine Harry Gaudry :

Est-ce qu’on se dirige vers une rupture des relations États-Unis-Chine avec des droits de douane à 130 % ?

Céline ? :
Non, non, je pense pas. Je pense que comme disait Philippe, on est dans un dans un bras de fer, mais à la fin, les gens se mettront d’accord autour d’une table. Enfin, j’ai du mal à penser qu’on puisse avoir une vraie rupture. Quelque part, pour moi, c’est l’arroseur arrosé de la part des États-Unis. C’est-à-dire que la la politique qu’ils ont mené jusqu’à présent, effectivement, y compris un certain nombre de formes d’extraterritorialité. Là, les Chinois sont un peu en train de faire pareril en disant attention pour les licences ’exportation, maintenant s’il y a, je crois que c’est 0, 1 % des composants en tout cas de qui qui contiennent justement des produits d’origine chinoise, donc des terres rares, et ben il faudra demander une licence d’exportation. Alors, notamment pour tout ce qui est militaire, sachant qu’en plus les terres rares entrent dans la composition de beaucoup de produits semi-conducteurs, des écrans des ampoules basse consommation, enfin et cetera. en plus tous les produits dont on a aujourd’hui besoin. Donc ils jouent leur atout et quelque part, on peut se dire c’est la réponse du berger à la bergère. Donc pourquoi pas ?

4. La réponse chinoise : une stratégie de « berger à la bergère »

De toute façon, in fine, il y a quand même des formes d’interdépendance mondiale. Les chaînes de valeur sont quand même hyper fragmentées, avec, des parties de la production disséminées partout sur le globe. Et de toute façon, on le voit quand on regarde la bataille sur les semi-conducteurs entre les États-Unis et la Chine, on voit vraiment un bras de fer. Les États-Unis sont quand même dans une position plus favorable. C’est d’ailleurs pour ça aussi qu’il soutiennent Taiïwan. Enfin, il y a toute une rivalité géopolitique. Donc pour moi, chacun montre ses muscles et et in fine, ils se mettront d’accord. Mais c’est vrai que ça prouve quand même que pendant que nous on réfléchit, je vais pas revenir sans arrêt là-dessus, mais à la réforme des retraites, les autres ils sont quand même dans un jeu de concurrence et de compétition internationale. Donc peut-être qu’on devrait nous aussi se réveiller. C’est le rapport Draghi

5. Le modèle chinois : planification vs. libéralisme

Antoine Harry Gaudry :
Oui, c’est pas l’Europe qui est en train de disparaître au milieu de tout ça ?

Léonidas :

Pas de d’ajout particulier en terme de connaissance si ce n’est d’ailleurs que Trump est un personnage fascinant. Il est à la fois ce matin en train de célébrer les fruits d’une paix dont il a été largement initiateur et au même moment dans la surenchère dans une guerre commerciale.

Mais je voudrais juste faire une petite focale sur les théories qui ont inspiré ces grandes puissances. On voit à
quel point la Chine a été capable de prendre des positions absolument stratégiques dans l’économie mondiale et et dans l’interdépendance. Et je reste toujours extrêmement sceptique. Je suis un passionné d’entreprise,
d’entrepreneur et je pense que chacun a compris que c’était la ligne directrice.

J’ai choisi le terme d’entrepreneurisme pour en parler et pas de libéralisme, c’est qu’on voit bien que la main invisible qui devait permettre au à l’incarnation du pays libéral de de d’occuper les meilleures positions, et bien on voit bien combien euh la planification chinoise et la réflexion à très long terme sur les positions stratégiques ont permis à la Chine d’occuper une position, vous allez me dire que c’est particulièrement le cas lorsqu’on a une population de 1 milliard trois d’habitants et que l’on on a effacé les autres libertés. Mais cela dit, la planification chinoise a quand même sur la main invisible quelques avantages et quelques atouts dont on voit à quel point ils ont pris la primeur.

Philippe Mutrici :
Pour compléter, une université australienne a publié il y a deux ans une étude sur les brevets technologiques clés pour l’avenir. Dans 37 des 50 technologies, la Chine est le premier déposeur de brevets. La France n’apparaît qu’une fois, en 5e position, pour le retraitement des déchets nucléaires. La domination chinoise est aussi visible dans les publications scientifiques.

Céline ? :

On travaille beaucoup avec mes coauteurs sur la question des publications chinoises / américaines. Ce qu’on montre c’est que quand même la Chine est encore dépendante de la recherche internationale et notamment de la recherche américaine. Et quand il y avait eu la Trump initiative donc qui consistait en fait à priver quelque part
enfin à frapper de soupçon les chercheurs chinois justement qui travaillait avec des Américains, on avait vu que la recherche chinoise avait un peu de mal à s’en remettre justement. Mais malgré tout ils ont fait un bon
considérable en terme de publications scientifiques

Philippe Mutrici :
Ils ont fait un bon considérable ! Les Américains sont 2e et après on va trouver le Royaume-Uni Corée du Sud le
Japon un peu l’Allemagne mais il y a une domination très forte et ça c’est l’avenir.

Donc en fait, comme le disait Léonidas, il y a un plan en Chine 2050 qui est de devenir la première puissance économique mondiale à la fois en terme de PIB par habitant, de PIB tout court probablement même si la population va baisser, mais aussi de technologie. Et donc ce qu’on voit sur les terres rares aujourd’hui, ça n’est que le début. Donc là, comme le disait Céline, il est temps qu’on applique le rapport Draghi.

Hervé Gouletequer :
Il y a deux choses : une réunion du comité central du Parti communiste chinois à la fin du mois pour éclairer les cinq prochaines années. Et du côté américain, un article dans *Foreign Affairs* soulignait les éléments intéressants du modèle économique chinois. Je suis persuadé que l’administration Trump va aller, un peu, dans cette direction .

Léonidas :
Effectivement, la redistribution des cartes nous amène aussi à nous interroger. Je sais que vous avez l’intention de nous parler un tout petit peu des économistes et des Nobel, mais je trouve que le libéralisme est mis à rude épreuve et que nous assistons à la décorrélation entre la dynamique entrepreneuriale, l’innovation entrepreneuriale et les théorèmes libéraux. On voit que l’un peut exister sans l’autre, d’où l’importance quelque part de les décorréler. On voit bien que l’intervention de l’État peut-être à certains moments extrêmement salutaire pour préserver la capacité à développer de l’innovation. Il est temps pour nous également de le faire parce que nous voyons nos industries péricliter.

6. Conclusion : vers une réindustrialisation européenne ?

Léonidas :
D’ailleurs, c’est aussi un des grands enjeux de ce nouveau gouvernement. J’ai vu à quel point tous ceux qui portent le message de la réindustrialisation sont présents dans ce gouvernement. C’est un un électrochoc qui passe un peu inaperçu au milieu de ce brouhaha de chaos. Mais la réindustrialisation reste la grande priorité de, j’allais presque dire de cette génération économique, la génération des nouveaux entrepreneurs.

Il est temps que l’on on sorte de de ce chaos pour fixer le cap sur cette priorité. C’est une priorité vitale pour notre économie.

Philippe Mutrici :
Le modèle chinois, c’est des subventions massives à l’innovation, mais aussi un modèle ultra-libéral, entrepreneurial et concurrentiel. Très innovant.

Antoine Harry Gaudry :
Le modèle chinois pour la France, peut-être prix Nobel d’économie ?

Voir en ligne : Transcription youtube retraitée par mistral

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